La Pratique des Austérités

selon les textes canoniques

Il y avait alors cinq hommes qui suivaient le Bodhisattva en pensant que, si ce dernier trouvait la Voie, il leur en prêcherait la Doctrine. A Uruvilvâ habitaient quatre femmes, nommées Balâ, Utpalâ, Sundarâ et Kumbhakâri, qui étaient toutes attachées au Bodhisattva par la pensée et qui se disaient : "Si le Bodhisattva quitte son foyer pour rechercher la Voie, nous deviendrons ses disciples. S'il reste à son foyer pour mener la vie laïque ordinaire, nous deviendrons ses épouses ou ses concubines."

Dès que le Bodhisattva fut arrivé à ce village, il commença à y pratiquer des austérités et il s'y exerça pendant six ans. Malgré cela, il ne peut voir de ses propres yeux la Doctrine suprême de la connaissance sainte. Alors, il se souvint : "Autrefois, lorsque je demeurais chez le roi mon père, un jour où j'étais assis sous un jambosier, je me débarrassai des pensées de désir et des autres choses mauvaises et vicieuses, et de demeurai alors plongé dans la première méditation, pourvue de raisonnement et de réflexion, pleine de joie, de bonheur et de pensée unifiée." Le Bodhisattva eut encore cette pensée : "En suivant cette voie de la méditation, peut-on vraiment tarir la source des douleurs ?" Et cette réponse s'imposa à sa pensée : "Oui, on peut tarir la source des douleurs par cette voie." Aussitôt, utilisant la force de son énergie, il cultiva et pratiqua cette connaissance et, en suivant cette voie, il put effectivement tarir la source des douleurs. Alors, le Bodhisattva pensa encore : "Est-ce au moyen des désirs et des autres choses mauvaises que l'on obtient ce bonheur ?" et il reconnut : "Non, ce n'est pas au moyen des désirs et des autres choses mauvaises que l'on obtient ce bonheur." Il eut encore cette pensée :"Est-ce bien en pratiquant l'absence de désir et en abandonnant les choses mauvaises que j'obtiendrai le bonheur ? Ce n'est certainement pas en infligeant des souffrances à mon corps que je l'obtiendrai. A présent, ne vaut-il pas mieux pour moi manger un peu de riz bouilli et de bouillie de grains grillés pour acquérir des forces suffisantes ?" Peu après, le Bodhisattva, abandonnant définitivement le jeûne très sévère qu'il avait pratiqué jusque-là, mangea un peu de riz et de bouillie de grains grillés afin d'acquérir des forces suffisantes.

Dès qu'il eut pris ainsi un peu de nourriture, les cinq hommes qui le suivaient furent complètement déçus et ils le quittèrent en se disant mutuellement : "L'ascète Gautama est insensé, stupide, il a perdu la Voie. N'existe-t-il donc pas une Voie de la Vérité ?" et ils partirent sur le champ.

Vinayapitaka des Dharmaguptaka in A.Bareau, op. cit.